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2026, l’année où l’énergie ne se paiera plus comme avant

À partir du 1er janvier 2026, les entreprises belges vont découvrir un nouveau mode de tarification : la tarification incictative. Ce changement, orchestré par les gestionnaires de réseau comme Ores ou Resa ne relève pas d’un simple ajustement tarifaire. Il s’agit d’une transformation profonde, pensée pour encourager un comportement énergétique plus intelligent. Analyse par Virginie Dejace.
20 novembre 2025 par
2026, l’année où l’énergie ne se paiera plus comme avant
Thomas PARENT

Jusqu’ici, la facture était principalement influencée par la consommation totale. Demain, l’heure à laquelle l’on consomme deviendra presque aussi importante que la quantité consommée.

Un système repensé : comprendre ce que l’on paie

Pour saisir l’impact de cette réforme, il faut revenir à la structure de la facture. Les « frais de réseau » rassemblent les coûts de distribution, décidés par les intercommunales locales, et les coûts de transport gérés par Elia. Ces montants dépendent de trois éléments : l’énergie consommée, la puissance maximale qui est demandée au réseau et un terme fixe.

Ces pointes, souvent méconnues des consommateurs, correspondent aux pics de consommation mesurés sur des périodes de quinze minutes, pendant lesquelles la puissance maximale est atteinte. Elles ne sont pas calculées sur la valeur maximale du mois, mais sur la onzième pointe la plus élevée. La pointe mensuelle est donc cette onzième valeur, tandis que la pointe historique correspond à la plus élevée des douze derniers mois. Un mois « calme » peut ainsi réduire la pointe mensuelle, sans pour autant faire baisser la pointe historique.

Ce schéma était jusqu’ici appliqué de manière relativement stable, avec une simple distinction entre heures pleines et heures creuses. Ce cadre va désormais évoluer vers un modèle plus dynamique. Les entreprises raccordées en basse tension et sous 56 kVA devront choisir entre deux formules : une tarification standard, proche du système actuel, et une tarification incitative pensée pour récompenser la capacité des usagers à adapter leur consommation en fonction des besoins du réseau.

Fin de la semaine, fin du week-end, place aux plages horaires

Dans la tarification standard, la logique reste familière, mais les horaires changent. Les heures pleines s’étendront désormais de 7h à 11h puis de 17h à 22h, tandis que les heures creuses occuperont le reste de la journée et la nuit. Autre nouveauté majeure : il n’existera plus aucune différence entre les jours ouvrables et les week-ends. Le prix du kilowattheure ne dépendra plus du calendrier, mais uniquement de l’heure.

Reste cependant une incertitude : la manière exacte dont il sera possible de demander la tarification incitative.

En parallèle apparaît un système totalement inédit : la tarification incitative. Ce mécanisme, réservé aux compteurs intelligents, introduit trois niveaux de prix. Les heures ECO seront les plus avantageuses, les heures MEDIUM se situeront dans la moyenne, et les heures de PIC deviendront les plus coûteuses. Ce ne seront donc plus seulement deux zones horaires qui rythmeront la consommation, mais cinq plages réparties tout au long de la journée, avec des différences de prix beaucoup plus marquées entre les heures les moins chères et les heures les plus chères. 

Consommer mieux

L’objectif est clair. Selon les analyses réalisées par Broptimize, l’électricité coûtera moins cher lorsque le réseau sera chargé de surplus, notamment entre 11h et 17h ou au cœur de la nuit. « On peut donc dire qu’on payera moins lorsqu’on aidera le réseau à respirer », résume Virginie Dejace, experte marché chez Broptimize.


Les premiers résultats sont significatifs. Les simulations menées sur des profils réels montrent que les entreprises actives principalement en journée peuvent réduire leur facture de manière importante. C’est le cas des commerces sans panneaux solaires, des bureaux, ou des bâtiments tertiaires dont l’activité s’étale entre 8h et 18. Broptimize a d’ailleurs effectué ses propres tests internes : la majorité de sa consommation étant réalisée en heures ECO ou MEDIUM, l’entreprise serait gagnante sous cette formule.

À l’inverse, les entreprises très fortement équipées en panneaux solaires, mais consommant essentiellement en fin de journée, ne profiteront pas automatiquement de l’incitatif. Un magasin avec photovoltaïque mais sans consommations nocturnes, par exemple, peut parfois être mieux servi par la tarification standard.

Une facture sans pénalité… mais pas pour toujours

Jusqu’en 2029, un avantage supplémentaire adoucira la transition pour les raccordements basses tensions en dessous de 56 kVa : les pointes de puissance ne seront pas facturées dans le cadre de la tarification incitative. [VD5] Elles seront toutefois mesurées, et devraient être intégrées à la facture à partir de 2030. Il faut cependant rester prudent : cette réintroduction est annoncée comme une intention des gestionnaires de réseau, mais les modalités exactes n’ont pas encore été publiées.

Cette période de quatre ans reste une opportunité pour les entreprises qui souhaitent s’adapter progressivement, optimiser leurs équipements ou lisser leurs consommations. « Nous avons plusieurs années pour analyser, comprendre et ajuster les comportements », insiste Virgnie Dejace.

Ores et Resa : à chacun sa stratégie tarifaire

Si tous les gestionnaires de réseau avancent dans la même direction, les impacts ne seront pas identiques partout. Pour les clients au-dessus de 56 kVA, Resa appliquera une forte hausse des frais de distribution dès 2026, de l’ordre d’une vingtaine d’euros par MWh. Ores, à l’inverse, se montre plus modéré, avec une augmentation située entre un et trois euros par MWh.

En-dessous de 56 kVA, les effets s’inversent : Resa se révèle plus avantageuse sur la tarification incitative, tandis qu’Ores impacte davantage ses hausses sur ces petits raccordements.

Ces disparités renforcent l’importance d’une analyse personnalisée. Il est devenu impossible de deviner quel tarif sera le plus rentable sans regarder les données réelles. Virginie Dejace le rappelle : « Le but du jeu, ce n’est pas de choisir à l’aveugle. Le vrai enjeu, c’est de connaître son profil énergétique avant de trancher. »

Une transition numérique et comportementale

Les entreprises qui disposent déjà d’un compteur intelligent ont une longueur d’avance. Elles peuvent connaître leurs pics, leurs creux, leurs habitudes de consommation heure par heure. Pour celles qui possèdent encore un compteur mécanique, une étape de transition sera probablement nécessaire pour accéder à la tarification incitative.

La révolution tarifaire est aussi une révolution numérique. La facture d’électricité ne se paiera plus seulement en kilowattheures, mais en intelligence. Ceux qui consommeront au bon moment pourront réduire leur coût. Ceux qui analyseront leurs données éviteront les mauvaises surprises. Chez Broptimize, cette analyse est déjà en cours pour plusieurs clients, via des simulations complètes basées sur leurs consommations réelles.

L’arrivée de 2026 marque donc un tournant. Pour certains, elle signifiera une hausse. Pour d’autres, une opportunité de réduire leur facture en adaptant leurs habitudes. Une chose est certaine : les entreprises qui anticipent auront un avantage clair. Et comme le rappelle Virginie Dejace, « Ceux qui se préparent et anticipent auront toujours plus de chance d’être gagnants. »


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